Unstoppable

Unstoppable, film catastrophe qui fleure bon le train-train des 90s

C'est promis, je ne ferais pas de jeux de mot ferroviaires faciles sur Unstoppable, film catastrophe dont le méchant monstre n'est rien de moins qu'un train fou sans conducteur rempli de produits toxiques fonçant droit sur une petite ville du Midwest américain, un pitch basique certes mais qui promet aussi beaucoup de fun pop-cornesque.

Tiré de faits réels – rien de tel que ce discours marketing bien rôdé pour accentuer le suspense … encore que cela indique immédiatement un happy-end puisque si le drame n'avait pu être évité, le fait-divers aurait été relayé par les médias du monde entier plutôt que de rester cantonné à un non-évènement local – le nouveau film d'action de Tony Scott sent bon le revival de ce genre de film qui provoque un plaisir coupable et qui était porté disparu depuis la fin du millénaire précédent. Partant d'un postulat très mince, le film souffre pendant une heure d'un rythme lénifiant, de personnages insignifiants (ô secours, les deux cheminots incompétents, légèrement benêts et très caricaturaux qui laissent partir le monstre d'acier suite à une bévue ridicule) et d'un manque d'ampleur dans l'enjeu pourtant au cœur du film: essayer de stopper le train avant qu'il n'atteigne la grande ville de la région et provoque une catastrophe majeure. Le scénario dilue ce thème central avec des rebondissements secondaires faussement spectaculaires et racoleurs – évidemment, un train scolaire se trouve sur la voie du train fou.

Heureusement, la dernière demi-heure se centre enfin sur le problème principal et Tony Scott peut fait la preuve de son indéniable efficacité. Le film prend son rythme de croisière et mène un train d'enfer (désolé, j'ai pas pu m'empêcher) pour scotcher assez efficacement le spectateur à son fauteuil, ce qui est la seule chose qu'on demande à ce type de films. Les deux anti-héros que tout oppose (l'un est un futur retraité blasé et veuf, l'autre un petit jeune pistonné qui veut reconquérir sa femme) et qui sont plongés dans une situation qui dépasse évidemment leurs compétences vont se transformer en sauveurs miraculeux, icônes emblématiques tant prisés par les Américains. Le tandem vieux briscard – jeune loup que forment Denzel Washington – Chris Pine a un peu de retard à l'allumage mais fonctionne finalement assez bien lorsqu'il s'agit de sauver le monde (enfin, de sauver une petite ville américaine du Midwest, ce qui n'est pas non plus exactement la même chose!).

Par contre, le père Scott ne peut s'empêcher de glisser quelques clins d'oeils assez lourdauds aux problèmes des retraites (si, si, voilà une critique du capitalisme que l'on n'était loin d'attendre dans Unstoppable) ainsi que d'égratigner les médias qui font évidemment monter en sauce l'incident en affaire d'État (Etat à prendre au sens premier du terme puisque ce sont des télés locales qui couvrent l'affaire). Cela n'apporte pas grand-chose au film si ce n'est quelques sourires en coin pour de l'humour que l'on ne sent pas toujours volontaire – certaines répliques étant particulièrement emphatiques et clichés.

Pour un film catastrophe, Unstoppable évite la panne sèche en rase campagne (décidément!) grâce surtout à son aspect de Madeleine de Proust rappelant de bons souvenirs de salles obscures d'il y a une quinzaines d'années. Tony Scott ne livre là ni son meilleur ni son pire film, juste un produit calibré plutôt efficace qui met tout de même un peu trop de temps à démarrer.

Emmanuel Pujol

 le 18 Novembre 2013 par mathhen02