Titre VO : Unter dir die Stadt
Un film de Christoph Hochhaüsler avec Robert Hunger-Buhler , Mark Waschke , Wolfgang Bock , Michael Abendroth , André Dietz
Genre : Drame - Durée : 1h49 - Année de production : 2010
Date de sortie cinéma : 15 Décembre 2010
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Roland, un banquier influent installé au sommet d'une tour d'un quartier d'affaires, rencontre par hasard Svenja lors d'une exposition d'art contemporain. Cet homme de pouvoir est violemment attiré par la jeune femme, dont l'époux travaille pour lui, à un étage inférieur...
Le cinéma allemand se porte bien, merci pour lui ! 2010 aura été marquée par des films aussi réjouissants (Soul Kitchen) que palpitants (La révélation) venus d’Outre-Rhin. Et quelques semaines après Le Braqueur, passé injustement aperçu, voilà que sort sur nos écrans Sous toi, la ville, nouvel exemple de l’« école de Berlin », sorte de nouvelle vague teutonne du XXIème siècle. Benjamin Heisenberg et Christoph Hochhäusler, réalisateurs des deux films susnommés, se connaissent d’ailleurs bien puisqu’ils ont crée ensemble la revue Revolver et que le premier a été le scénariste (pour Bois Lacté) du second.
Sous toi, la ville narre la relation adultère entretenue entre un puissant banquier d’affaires francfortois avec la femme de l’un de ses employés. Exposé comme cela, rien de bien original sous la grisaille allemande. Mais Christoph Hochhäusler a une façon très particulière de filmer ce drame de l’intime mêlée à une féroce dénonciation de l’ultra-capitalisme. Car le plus grand intérêt du film réside dans sa cinématographie très recherchée et son montage déroutant.
Le réalisateur soigne tous ses cadres pour faire de Francfort une ville presque déserte où l’important se passerait dans les gratte-ciels froids entre employés ambitieux et sans scrupules de la finance mondiale. A coup de travellings horizontaux sur un paysage vertical, Hochhäusler donne une dimension très géométrique et calculée à son propos. D’une froideur extrême, l’image renvoie aussi au caractère du personnage principal, le reptilien banquier Roland Cordes (glaçant Robert Hunger-Buhler) qui dégage une antipathie naturelle. Il est ainsi difficile de comprendre ce qui pousse dans ses draps la fantasque Svenja Steve (Nicolette Krebitz, pas une beauté éclatante).
Car, et c’est probablement ce qui peut le plus désorienter dans ce Sous toi, la ville, le réalisateur ne donne aucune explication à cette attirance. Son montage se fait volontairement elliptique, sautant parfois d’une scène à l’autre de façon très étrange et demandant au spectateur un véritable effort pour recoller les morceaux. Il sème des indices ici ou là , désoriente son public avec d’énigmatiques scènes de shoot, filme le sexe sans passion, de façon totalement désincarné,… Cela peut autant fasciner qu’agacer, d’autant plus que le film abuse parfois de cette rigueur formelle dans lequel il semble s’enfermer au détriment de toute émotion. Ce carcan rigide provoque en effet une distanciation qui rend presque impossible toute empathie avec les personnages. Cette forme, épurée et travaillée à l’extrême, se retrouve aussi dans le choix d’une bande son à l’arythmie angoissante.
Fausse histoire d’amour mais véritable déclaration d’intention politique, ce Sous toi, la ville se termine par un ultime pied de nez, une fin étrange et allégorique, à la limite de l’onirisme cauchemardesque. Volontairement désagréable et difficile d’accès, le film n’en reste pas moins une variation intéressante et stylistiquement originale sur les rapports incestueux entre sexe et pouvoir et une dénonciation glaçante de l’ultra-capitalisme.
Emmanuel Pujol
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