Priest

Priest, aménités vampiriques

Faisant rage depuis des siècles (belle introduction sous forme de dessin animé mais avec une voix-off qui met dans le ton d’entrée : pas d’humour pour un scénario qui se prend bien trop au sérieux), la guerre entre humains et vampires a finalement été gagnée par les premiers grâce à l’intervention des Prêtres, des super-guerriers reconnaissables par leur croix gravée sur le visage au service d’une Église devenue toute puissante mais tombés en disgrâce depuis la fin des combats. Les hommes vivent désormais presque tous à l’intérieur des murs de villes sombres et tristes qui ne sont pas sans rappeler celles de Blade Runner. A l’extérieur, un no man’s land brulant de chaleur où quelques courageux exploitent une terre aride. C’est aussi là que se trouvent les dernières réserves de vampires, enfermés pour l’éternité dans des tombeaux humides. Quand la nièce d’un Prêtre est enlevée dans un des villages isolés dans ces terres perdues lors de ce qui semble être une attaque de vampires, le croisé moderne va briser ces vœux  et se mettre à dos le clergé (dont le credo abrutissant résonne à toute heure « Désobéir à l’Eglise, c’est désobéir à Dieu ») pour retrouver la jeune fille.

Adapté d’un comic japonais à la sauce US (adapté est un bien grand mot, disons inspiré !), réalisé par Scott Charles Stewart un spécialiste des effets spéciaux et produit par Screen Gems, responsable du nanardesque Légion – L’armée des anges avec déjà un Paul Bettany qui semble se rêver en action hero, Priest ne partait pas sur les meilleures bases. Pourtant, le film pourrait être en quelque sorte la rencontre de Mad Max – pour le côté désertique apocalyptique - et du Vampires de Cronenberg – pour l’aspect western - avec des créatures plus animales qu’humaines plutôt flippantes, des êtres hybrides aveugles et à la peau translucide, assoiffés de sang et servis par des infectés qui, lorsqu’ils sont mordus, se transforment en esclaves des veilleurs de nuit. Problème ? L’ensemble est à la fois totalement lisse et terriblement prévisible. Ce n’est même pas nul, c’est juste insignifiant, l’ensemble est en mode pilotage automatique terriblement paresseux. Même le climax, une attaque de train qui se voudrait dantesque respire le déjà vu en mieux et manque de souffle et de suspense. Pire, les pistes de réflexion potentiellement intéressantes – sur la religion, sur l’exclusion, sur la solitude – sont systématiquement escamotées (on est dans un blockbuster, faudrait pas trop réfléchir non plus !).

Pour ne rien arranger, notre prêtre héros aux nobles intentions est en plus affublé d’un sidekick au-delà de la caricature (il faut dire que le minet Cam Gigandet en rajoute des tonnes) et d’une belle guerrière intrépide (Maggie Q assure côté sex-appeal et femme forte dans un rôle bien schématique aussi) : le cahier des charges du blockbuster sans surprise est respecté jusqu’au bout avec un invraisemblable happy-end qui laisse la porte grande ouverte à une suite des aventures du Priest en cas de succès au box-office. Le monde proposé est pourtant assez intéressant pour se dire « pourquoi pas » à condition de s’adjoindre les services d’un scénariste un peu plus ambitieux et d’un réalisateur avec une vraie vision cinématographique. Bizarrement, j’en doute mais je vais quand même prier pour un miracle…

Emmanuel Pujol

NDLR : Tiens, j’oubliais presque de signaler que le film était en 3D. Évidemment, elle ne sert strictement à rien. Je pense que je ne parlerais décidément plus de ce gadget technologique jusqu’à ce que je voie enfin un film utilisant cet artifice de façon convaincante. Étrangement, je pense que ce n’est pas gagné…