Titre VO : The Adventures of Tintin: Secret of the Unicorn
Un film de Steven Spielberg avec Jamie Bell , Andy Serkis , Daniel Craig , Nick Frost , Simon Pegg
Genre : aventures - Durée : 1h47 - Année de production : 2011
Date de sortie cinéma : 26 Octobre 2011
Distributeur :
Tintin, notre intrépide reporter, son fidèle compagnon Milou et son inséparable ami le Capitaine Haddock partent à la recherche d'un trésor enfoui avec l'épave d'un bateau la Licorne, commandé autrefois par un ancêtre du Capitaine Haddock.
Depuis la série télé d’animation il y a 20 ans, plus personne n’avait plus osé s’affronter au petit reporter le plus célèbre de la bande dessinée. Tintin était réputé inadaptable, notamment à cause de la fameuse ligne claire, ce langage graphique si typique du style d’Hergé. Et ce ne sont pas les deux films en prises de vue réelles - Tintin et le mystère de la Toison d’Or (1961) et Tintin et les Oranges bleues (1964) - qui pourraient contredire cet état de fait : transposer les aventures de ce monstre sacré du 9eme art (plus de 200 millions d’exemplaires vendus à travers le monde !) à l’écran, c’était risquer de s’attirer les foudres de ses innombrables fans.
Mais s’il y a bien un réalisateur qui pouvait s’y attaquer, c’est indéniablement Steven Spielberg*, fan de Tintin depuis toujours et qui a acquis les droits de la bande dessinée depuis … 1984 ! Mais il a fallu attendre le développement de la performance capture pour que le papa d’Indiana Jones trouve un outil technologique satisfaisant pour enfin porter à l’écran Tintin et ses célèbres compagnons, le capitaine Haddock, Milou et les autres. Avec l’aide de Peter Jackson, à la fois producteur et responsable des effets spéciaux via Weta (déjà aux commandes de ceux d’Avatar et du récent Planète des Singes : Les Origines), il s’est donc lancé dans une trilogie tintinophile dont le premier épisode, Le Secret de la Licorne, est une libre adaptation de trois albums de l’intrépide reporter : celui qui donne son titre au film bien sûr plus, évidemment, Le trésor de Rackham le Rouge ainsi que Le Crabe aux Pinces d’or. Ce qui pourrait sembler une incongruité pour les habitués de Tintin ne devrait pas déranger ceux qui ignorent tout des aventures du jeune belge, et en premier lieu le public américain qui ne connait que très mal la BD. Et, en plus d’offrir l’opportunité à Spielberg de réaliser une incroyable séquence de course-poursuite dans une ville portuaire marocaine, Le Crabe aux Pinces d’or est surtout connu pour avoir marqué la rencontre entre Tintin et le capitaine Haddock !
Et si donc l’adaptation n’est pas fidèle à la lettre à l’œuvre d’Hergé, elle l’est incontestablement à l’esprit de Tintin. Et pour s’en convaincre, il suffit de quelques minutes de film : passé un superbe générique en animation classique qui raconte à lui tout seul une histoire, le film s’ouvre sur une symbolique transmission de flambeau entre le dessinateur et le réalisateur. En effet, au marché aux puces de la place du jeu de balles dans le quartier des Marolles à Bruxelles, Tintin se fait croquer son célèbre portrait par lui-même avant de tomber devant la maquette de La Licorne que lui vend un antiquaire sous les traits duquel se cache… Spielberg !
Techniquement et visuellement, le pari est remporté haut la main, c’est plus – et ce de façon étonnante - au niveau des émotions que le film pèche. Spielberg a en effet parfaitement compris comment il pouvait utiliser les outils technologiques dont il disposait et il signe une mise en scène virtuose avec de vrais moments d’anthologie. Il trouve des cadres assez incroyables en utilisant avec brio la caméra virtuelle – la scène de bataille navale et celle de la course-poursuite (dont l’extrait visible dans la bande-annonce avec la moto-tyrolienne n’en est qu’une infime partie) en sont les illustrations les plus probantes. Même le graphisme des personnages est plutôt convaincant alors qu’il suscitait le plus grand scepticisme quand les premières images avaient été dévoilées.
Mais si les acteurs (Andy Serkis évidemment, incontournable quand on parle de performance capture, mais aussi Jamie Bell, Daniel Craig, Nick Frost et Simon Pegg) font de leur mieux pour donner vie aux personnages d’Hergé, il manque de la vie et du relief (un comble pour un film en 3D – inutile et même épuisante pendant les scènes d’action) à ce Tintin. Tout reste très propre et très lisse, il n’y a jamais le caractère insidieusement étrange de la bande-dessinée qui transpire à l’écran. Et quand au bout d’une heure plutôt agréable (même si Tintin parle sans cesse à Milou pour lui expliquer le pourquoi du comment de chacune de ses déductions et de ses actions – ce qui devient trop didactique même pour les enfants !), Spielberg décide de céder aux sirènes hollywoodiennes, il transforme alors Tintin en Indiana Jones bis, ne se consacrant plus qu’à l’action pure. Alors, c’est certes très efficace, parfaitement exécuté mais c’est totalement dénué d’âme et d’émotion, on a l’impression de se retrouver devant un blockbuster traditionnel avec explosions à gogo et humour pataud.
Mille milliards de mille sabords, ce Tintin là n’aurait sans doute pas déplu à Hergé car il a au moins le mérite de ne pas dévoyer l’esprit de la bande-dessinée mais il lui manque sans doute un petit grain (de Tournesol ?) de folie pour pleinement emporter petits et grands dans ses folles aventures à travers le monde…
Emmanuel Pujol
*NDLR : A ce titre, Laurent Malbrunot a signé aux éditions Pascal Galodé un passionnant portrait croisé de Spielberg et d’Hergé duquel il ressort que les univers de ces deux créateurs étaient voués à se rencontrer à un moment ou à un autre tant leurs thèmes de prédilection sont proches…
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