L'Attentat

L'attentat : une tentative réussie

L'Attentat de Ziad Doueiri, ou comment accepter et comprendre que sa femme soit responsable d'un attentat-suicide ? Pro-rien du tout et prenant, le film s'inscrit dans la lignée de ces films considérés comme traîtres par certains pays. L'Attentat est ainsi banni au Liban, pays d'origine du réalisateur. Loin d'être une exception, ce cas de figure est cependant bon à rappeler.

Ancré dans une triste réalité où le réalisateur ne choisit pas de camp, L'Attentat se meut par touches humaines, abordant progressivement les questions du rejet par l'origine ou la religion, puis de la réputation entachée ou encore la question du deuil bafoué.

Plus importante encore, la question du "pourquoi ?" ne tombe pas dans les facilités ethniques ou religieuses et propose d'autres lectures plus personnelles, plus intimes. Et si les relations d'une personne traçaient pour elle un chemin fort étrange ? Qui, de son mari, de sa famille ou d'éléments extérieurs aura le plus influencé Siham ?  Bien que le film se garde de trancher trop catégoriquement, chacun peut saisir les hypothèses qu'il souhaite au vol, entre deux personnages attachants ou des idées surprenantes. Le voyage est à la fois agréable et tendu pour le spectateur, qui souhaite en savoir plus tout en découvrant un univers qui ne ne met pas forcément à l'aise.

L'Attentat ne relève cependant jamais de l'expérience désagréable. Au travers de paysages urbains fascinants et présentés dans des cadres classiques, le film explose des convictions avec douceur. En nous entraînant sur des pistes crédibles et dans un habillage calibré mais sans jamais nous forcer la main par trop d'effets, Ziad Doueiri offre un film délicat et efficace sur un sujet sensible.

Rarement ennuyeux, L'Attentat est de ces films efficaces qui proposent à la fois la découverte de personnages plus complexes qu'il n'y parait, un sujet d'actualité fort et une mise en scène simple mais sans grave bémol. Servi par une jolie interprétation, on peut notamment saluer la prestation de Karim Saleh pour ce film dans un rôle qui ne comporte que de rares scènes mais dont l’ambiguïté et les implications se répercutent grâce à la justesse du jeu d'acteur. Au final, un petit coup de cœur auquel ne manquerait qu'un poil d'audace dans sa mise en scène : attentat réussi.

Cynthia Minot