Titre VO : Kadosh
Un film de Amos Gitaï avec Yussef Abu Warda , Yoram Hattab , Uri Klauzner , Sami Hori , Samuel Calderon
Genre : drame - Durée : 1h50 - Année de production : 1999
Date de sortie cinéma : 01 Septembre 1999
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Dans le quartier juif orthodoxe de Jérusalem, le destin de deux soeurs est bouleversé par les décisions sans appel du rabbin de la communauté : Rivka doit être répudiée par son mari car elle ne lui donne pas d'enfant, et Malka épousera ce Yossef qu'elle n'aime pas. Si la première se résigne tristement, la seconde choisit la rebellion.
Le cinéma peut-il être une arme contre l'extrémisme ? Dès lors que le principal atout de l'extrémisme est le silence, oui. Amos Gitaï, cinéaste indiscutablement engagé, sait se rendre audible. A plus forte raison quand il aborde un sujet sur lequel on l'encourage vivement à se taire : l'extrémisme religieux. Celui qu'il connaît. Celui d'une branche de la communauté juive orthodoxe de Jérusalem.
Nulle facilité dans le discours, et pas de risque d'amalgame stupide. Jamais Gitaï ne va appeler à l'universalité de son sujet, et jamais on ne risque de confondre son scénario avec une quelconque attaque anti-judaïsme : il a sorti une loupe, un stéthoscope et il va scruter le destin de quelques individus que le fanatisme menace d'engloutir. Trois individus, en fait : un couple tout d'abord, éperdument amoureux mais sans enfants (comprenez : sans descendance). Quelqu'un est stérile, mais qui ? Pour le rabbin, le débat est tranché, et c'est la belle Rivka qui doit être mise au ban de la communauté. Sa soeur ensuite, Malka, au tempérament bien tranché et que son environnement va chercher à briser. Rien de bien gai ou de bien optimiste là -dedans : la nuit de noces de Malka est un viol, certains dialogues frappent aussi sûrement que les coups de ceinture... Ce qui terrifie, au-delà de l'avenir qui attend ces personnages, c'est ce sentiment qui parvient à dépasser les limites de la fiction : les femmes ont de tout temps toujours été les premières victimes de l'obscurantisme. Et ici, elles sont bafouées, physiquement et moralement.
Loin de toute leçon de morale, "Kadosh" aborde la forme du documentaire cinéphilique. Âpre, sans doute. Sans décorum inutile, sans mise en musique particulière. Le rythme est lent, méthodique : rien n'arrête la marche en avant des conservateurs. Peut-être un brin de "mise en scène" supplémentaire aurait-elle pu ouvrir le champs d'un tel film à un plus large public : en l'état, tout cela est sans doute trop austère. Mais le risque était fort de diluer la charge puissante : "Kadosh" tire une grande partie de sa force de ce dénuement, de ce choix radical. Les interprètes emportent le morceau sans coup férir (Yaël Abecassis mène d'ailleurs depuis une carrière assez exemplaire) et le montage est d'une sobriété et d'une intelligence qui forcent le respect. Le respect, un maître mot pour un maître film, qui a su lors de la projection à laquelle j'assistais alors faire naître du mutisme choqué la plus belle réponse qui soit : la parole et le débat. Parce que le cinéma peut être une arme contre le silence.
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