Fantastic Mr. Fox

Fantastic Mr Fox, un plaisir de cinéma signé du rusé dandy Wes Anderson

Il est assez rare de voir un réalisateur passer du film « live » au dessin animé. C’est pourtant le pari osé que relève avec brio Wes Anderson et le tout sans pour autant abandonner son style très reconnaissable et ses sujets de prédilection.

En prenant comme point de départ le roman de Roald Dahl (auteur anglais de livres pour  petits et grands enfants – entre autres, Charlie et la Chocolaterie et James et la pêche géante, déjà adaptés au grand écran) et en étoffant l’histoire avec son fidèle scénariste Noah Baumbach, Wes Anderson a parfaitement su saisir l’esprit de l’espiègle écrivain so british et s’approprier son univers à la fois joyeux et inquiétant. Résultat ? 1h28 de pur plaisir, d’animation de figurines à l’ancienne en stop-motion (image par image) avec un style assez rustique: la fourrure des animaux bougent de façon désordonnée, certaines scènes ne comportant que 12 images par seconde (au lieu des 24 « réglementaires ») ont un rendu plus saccadé et artisanal correspondant parfaitement aux propos du film.

Le propos justement, parlons-en… Monsieur Fox (un renard, qui l’eût cru ?) s’est rangé des voitures et a troqué sa panoplie de voleur de poules pour un costume plus étriqué de bon père de famille et éditorialiste dans une feuille de … choux que personne ne daigne lire. Mais le démon de midi – et une crise aigue de la quarantaine (soit 7 années-renard !) – le reprend quand il emménage avec femme et enfant dans un grand chêne (le décor a été moulé à partir d’un bout de l’écorce d’un chêne séculaire dans la propriété de Roald Dahl ou Anderson et Baumbach ont fini d’écrire le scénario. D’autres clins d’œil en hommage à l’écrivain sont d’ailleurs présents dans le film) : sa nouvelle demeure se situe juste en face des trois plus grandes exploitations agricoles de la région et dont les propriétaires sont d’affreux fermiers capitalistes.

Humour grinçant et action trépidante rythment cette comédie dramatique qui voit s’opposer des animaux très humains et solidaires à des hommes bestiaux et abêtis. La fable évidemment morale se teinte d’un cynisme de bon aloi grâce à son incorrigible personnage principal, un gentleman cambrioleur à la Arsène Lupin, charmeur et roublard qui bénéficie de la voix espiègle de George Clooney en v.o. (et de celle du non moins talentueux Matthieu Amalric en français). A propos du doublage, il est intéressant de noter que Wes Anderson a fait preuve d’originalité pour enregistrer les voix : loin du classique studio, il a emmené l’ensemble des comédiens retenus dans un ranch isolé pour jouer les situations en live et capter leur voix en pleine action. Le rendu à l’écran est assez bluffant et l’on comprend mieux les intonations réalistes des personnages !

Et l’univers de Wes Anderson dans tout ça ? Le réalisateur américain ne renie en rien son style habituel (gros plans fixe sur des visages alternés avec des plans très larges de l’action, costumes démodés en flanelles et grosses mailles, couleurs passées – regardez, il n’y a jamais de vert dans le film, une vraie gageure quand on sait que l’histoire se déroule à la campagne !), son thème fétiche de la famille dysfonctionnelle le tout sur fond de BO très sixties – des Beach Boys aux Rolling Stones en passant par le très fashion Jarvis Cocker.

Ce Fantastic Mr Fox est bel et bien une bobine fantastique et réjouissante de poésie et d’inventivité pour le plus grand plaisir des enfants et de leurs parents.

Emmanuel Pujol