Titre VO : Estómago
Un film de Marcos Jorge avec João Miguel , Babu Santana , Paulo Miklos , Carlo Briani , Zeca Cenovicz
Genre : drame - Durée : 1h52 - Année de production : 2007
Date de sortie cinéma : 19 Mai 2010
Distributeur :
Depuis qu'il a débarqué en ville, Nonato cuisine. Petit à petit il a appris à survivre dans cette société où cohabitent ceux qui mangent et ceux qui sont mangés. Et lorsqu'il peut enfin prendre part au destin, nul mieux que lui ne sait quel est le meilleur morceau...
Manger ou être mangé ? Éternelle question qui touche tous les maillons de la chaine alimentaire et au sommet de laquelle trône l’homme. Mais quel plus grand prédateur pour l’homme que lui-même avec son ambition, sa jalousie et sa soif de reconnaissance ? L’amour, le pouvoir et la cuisine constituent le triptyque incontournable et infernal sur lequel se base la fable truculente que propose le réalisateur brésilien Marcos Jorge. Il la fait débuter sur un gros plan de la bouche de Raimundo Nonato, un loser magnifique qui n’a pour lui – mais c’est déjà beaucoup – qu’une maestria culinaire hors norme, et qu’il achève sur une vue des fesses de son anti-héros, métaphore évidente du long-métrage vu comme une digestion de 90 minutes.
Marcos Jorge mène deux récits en parallèle : le premier présente l’ascension de Raimundo, débarquant en ville venu de nulle part et sans un sou. Après avoir régalé les clients – dont une prostituée affamée dans tous les sens du terme - d’une immonde gargote avec ses coxinhas, il se fait embaucher par Giovanni, patron débonnaire et passionné d’un restaurant italien réputé qui va lui apprendre les secrets artistiques de la cuisine. L’autre histoire débute quand Raimundo arrive en prison et qu’il va devoir se faire une place dans la hiérarchie très structurée de sa cellule qu’il partage avec des personnages hauts en couleur – au premier lieu desquels Bujiu qui règne en maitre incontesté des 25m² dans lesquels s’entassent 6 détenus. Il est très vite évident que les deux histoires vont fatalement se rejoindre, la 1ere en flashbacks successifs menant à la 2nde.
Et le réalisateur a suffisamment le sens du rythme, ménageant rebondissements malins et construction maitrisée de ses deux histoires, pour que le spectateur prenne un plaisir non feint à suivre le destin de Raimundo le cuisinier, parti de rien mais qui veut lui aussi sa part du gâteau. Marcos Jorge a aussi la chance de pouvoir compter sur un excellent casting : Joao Miguel prête sa nonchalance et son air d’abruti heureux qui fait tout sans avoir l’air d’y toucher à Raimundo, Carlo Briani est un Giovanni charmeur et manipulateur et Fabiula Nascimento en pute friande de bonne chaire a de faux airs d’Andréa Ferrol dans La Grande Bouffe.
La question que pose le film est bien de savoir pourquoi croquer et déguster ne seraient réservés qu’aux forts, aux riches et aux puissants – surtout que qui mieux que le cuisinier maitrise les différents ingrédients de la recette du plaisir gustatif ? Voilà un film qui porte bien son nom, un manifeste politique déguisé en conte rabelaisien, cynique et jouissif dont on sort à la fois l’esprit repu et le ventre affamé. Après le réjouissant Soul Kitchen, 2010 est décidément un bon cru pour les papilles cinéphiles !
Emmanuel Pujol
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