Cars 2

Cars 2, Pixar nous fait le coup de la panne

25 ans, 12 longs-métrages d’animation, 26 Oscars, 6 Golden Globes, une créativité et une indépendance jamais démenties - même depuis le rachat de la firme à la lampe par le géant Disney : le parcours de Pixar en ¼ de siècle d’existence est assez exemplaire de réussite et d’intelligence. Jusqu’alors, à chaque nouveau film, Pixar avait su se réinventer, se remettre en question et proposer des films d’animation parlant aussi bien aux plus jeunes spectateurs qu’aux adultes. Tout cela était vrai jusqu’à … Cars 2 ! Il est vrai que le projet ne faisait déjà pas l’unanimité auprès des fans, le premier Cars étant considéré par beaucoup comme l’un des Pixars les plus faibles.

Bien sûr, le retour aux affaires de John Lasseter, devenu le grand gourou de Disney et ayant délaissé la réalisation depuis … Cars, accompagné par Brad Lewis, le papa de Ratatouille, garantissait à Cars 2 un savoir-faire inégalable et un soin des détails quasi-obsessionnel. Là-dessus, pas de problème : reconstitution léchée de Tokyo, Londres et Paris dans l’univers 100% voitures de Cars, foisonnement des personnages en arrière-plan (926 nouveaux personnages crées pour le film, un record pour Pixar), adéquation des héros avec leur doublure voix originale* (Owen Wilson, Michael Caine, Emily Mortimer et même en guest-stars, Lewis Hamilton et Jacques Villeneuve . Ce dernier étant francophone, il est également présent dans la V.F. au côté de la clique de potes Guillaume Canet, Mélanie Doutey et Gilles Lellouche, pas convaincant du tout en Martin la dépanneuse), …

Tout cela est bien joli mais cela ne suffit pas à faire de Cars 2 une réussite. Pourquoi ? Parce que le scénario manque cruellement d’enjeux et est particulièrement enfantin et surtout niais, défaut que Pixar avait toujours su éviter jusqu’ici. Sans parler de l’humour omniprésent et d’une lourdeur sans nom qui ne fera rire (et encore) que les plus petits. Le personnage principal n’est plus Flash McQueen mais Martin la dépanneuse, un gaffeur invétéré et un benêt de première. Martin, c’est un peu une sorte de Jar Jar Binks sur quatre roues, un personnage vite fatigant et exaspérant, une terrible erreur qui semble plus sortir tout droit du marketing gérant les produits dérivés que d’une équipe artistique censée. L’autre point faible de cette suite était déjà perceptible dans le premier Cars : il est très difficile de rendre attachant des voitures, de créer une véritable empathie avec de tels personnages dont le destin nous importe finalement assez peu. Aucune créature vivante (humaine ou animale) n’existe dans cet univers mécanique et finalement très artificiel. Jamais l’émotion ne parvient véritablement à transpirer des moteurs vrombissants et des carrosseries rutilantes, malgré tous les efforts visibles des animateurs. Cars 2 manque d’un élément essentiel et dont les voitures sont naturellement dépourvues : d’une âme !

L’an prochain se profile Rebelle, le premier Pixar réalisée par une femme et ayant une héroïne féminine… Un projet qui laisse de l’espoir et qui fera peut-être passer ce cru 2011 pour une simple sortie de route accidentelle.

Emmanuel Pujol

*NDLR : La projection à laquelle j’ai assisté était – malheureusement – en VF ! A noter d’ailleurs que les enfants présents à la séance ont beaucoup moins réagi que devant de précédents Pixar ou encore des récents Contes de la Nuit. Peut-être est-ce là la meilleure preuve que Cars 2 est un produit certes très propre mais terriblement calibré et qui manque cruellement de magie et de malice.

NDLR 2 : Une autre particularité réjouissante de Pixar est de proposer avant chaque long-métrage un court-métrage généralement original et hilarant. Et même là, la déception est de mise car même si Vacances à Hawai est plutôt réussi, il reprend de façon assez paresseuse les personnages emblématiques (notamment Barbie et Ken) de Toy Story 3 sorti l’an dernier. Et si Pixar était en train de perdre son âme et devenir un studio comme les autres, surfant sur des franchises à succès ? Espérons que non…
 

 le 03 Juillet 2014 par Chunky